Les problèmes non résolus du service militaire, de la pauvreté des soldats, de l’indiscipline, du non respect politique du tableau d’avancement, des tensions ethniques réactivées par la concurrence multi-partisane, de la contestation par les jeunes militaires de l’ordre politique, sont les raisons qui ont déstructuré l’armée ivoirienne. Le coup d’Etat de décembre 1999 est à la racine de la tragédie qui a vu la société ivoirienne basculer dans la violence parce qu’il a eu pour conséquence de diviser profondément l’armée en factions rivales en l’éloignant, de façon marquée, de la population. La crise militaro-civile aura signifié la montée en puissance d’une violence multiforme servie par une génération de jeunes frappés par le chômage et la précarité.
Une armée marginalisée par le compromis houphouëtiste
Depuis 1990, les soldats sont « en révolte » parce que l’armée elle-même est « en désordre » malgré les tentatives de construire une « nouvelle armée » ivoirienne. Comprendre la crise de l’armée ivoirienne implique un retour en arrière sur la manière dont le problème de la violence fut réglé sous Félix Houphouët-Boigny. La société ivoirienne est restée stable, malgré les contradictions qui la traversaient en profondeur, parce qu’elle reposait sur l’ouverture vers l’extérieur, sur le système du « grilleur d’arachides » et sur la gestion inclusive de la diversité sociale. Il faut ajouter à ces trois paramètres un quatrième qui rend compte de la logique spécifique de la mise en forme de la violence en Côte d’Ivoire. Au fond, la répression des « complots imaginaires » de 1962 et de 1963 a provoqué, comme par défaut, le monopole de la violence instrumentale par la marginalisation des structures de coercition et par la mise au pas d’une jeunesse tumultueuse et contestatrice.
L’armée ne fut, à aucun moment, un acteur essentiel de l’action politique conduite par le président Félix Houphouët-Boigny. Il s’en servit lors des crises politiques du Sanwi et du Guébié en évitant, cependant, d’en faire un des piliers de son régime. Certains observateurs en conclurent qu’il se méfiait de l’armée au point de prendre le parti d’une paupérisation de l’outil militaire après avoir confié la défense de son pays à l’ancienne puissance coloniale. En fait, il mit en place une armée de format réduit, convenablement équipée, dont les soldats jouissaient de certains privilèges qui lui a valu l’appellation d’« armée suisse d’Afrique » en raison du pacifisme affiché de son chef suprême et des conditions matérielles de vie qui étaient les siennes.
Si les soldats du rang devaient donner leur « sueur pour le développement » du pays, les cadres militaires furent, quant à eux, associés à la gestion de la chose publique. Les officiers avaient vocation à participer à l’administration de la nation et à assumer des postes civils de responsabilité. Les FANCI garderont pendant longtemps l’image d’une armée apolitique, pluriethnique, légaliste, soucieuse de participer, par le haut et par le bas, au développement de la nation. Une telle situation n’en a pas fait pour autant une force autonome, détentrice d’une légitimité lui permettant de participer à la structure du pouvoir. Trois raisons expliquent cette marginalisation. La première est que l’armée n’était pas née d’une relation conflictuelle avec la puissance coloniale, encore moins d’une lutte de libération nationale. La deuxième est le contexte peu favorable de la guerre froide à la constitution d’armées fortes. Ce désavantage fut transformé par une intelligence politique qui fit jouer ensemble l’armée, les accords de bons voisinage et les exigences mondiales de sécurité pour assurer la défense de la Côte d’Ivoire. Enfin, la troisième raison est liée au fait que le président Houphouët-Boigny avait une conscience aiguë de ce qu’une armée divisée, devenant un acteur du jeu politique, constituait un danger pour la nation : « Je ne veux pas vous livrer aux militaires… Vous tremblez ! Je les connais. »
Les raisons de la mutinerie de 1990
Les jeunes soldats des classes 87/1A, 87/2A, 88/1A et 88/2A, libérables en décembre 1990 et juin 1991, se sont mutinés pour contester la décision prise de créer et de reconnaître une nouvelle milice dénommée les « Loubards ». Ils venaient de faire leur rentrée en politique.
Telle est la première raison d’un soulèvement militaire inédit. Une deuxième raison était au départ de la crise militaire de 1990 : la dignité trop souvent bafouée du soldat. En 1990, au moment où souffle le vent de la démocratie, les soldats refusent désormais d’être des « boys militaires ». La troisième raison était l’habitude de certains officiers supérieurs de détourner à leur profit des avantages revenant aux soldats. Ce sont toutes ces « frustrations » qui vont alimenter en permanence les soubresauts de l’armée jusqu’au coup d’Etat de 1999.
Il y a une autre raison plus objective qui explique l’impasse dans laquelle s’est retrouvée l’armée ivoirienne après la mutinerie de 1990. Un de ses mécanismes de régulation interne a été en effet brisé. Alors que le militaire vivait en caserne, ne pouvant se marier ni disposer d’un logement baillé avant les cinq ans qui suivent son engagement, la nouvelle politique militaire avait décidé d’attribuer des logements aux soldats. Le résultat invisible, au départ, a été la sortie progressive des militaires hors des casernes. Ils n’y sont plus retournés depuis pour vivre en « ville » comme les civils en adoptant leurs comportements en matière de vie sociale. Ils s’endettèrent auprès des « margouillats » en recherchant, par tous les moyens, mais en vain, les ressources de leur vie nouvelle. L’argent était devenu le syndrome d’une nouvelle maladie militaire dont le racket sera le symptôme.
Toutes ces raisons ont conduit à la crise militaire de 1990, dans un contexte de contestation généralisée qui rend encore plus explosif le soulèvement militaire. Pour la première fois, des soldats du rang disent non au traitement qui leur est réservé. Ils se sont soulevés pour revendiquer leur incorporation dans l’armée avec un salaire garanti et des privilèges d’agents permanents de l’Etat. Ils demandaient de quitter l’armée à l’âge de 55 ans comme les policiers, les gendarmes et les autres fonctionnaires.
Ce nouveau soldat ivoirien entend respecter l’ordre et la discipline sans être « frustré ». Il s’agit d’une révolution remarquable des modes d’obéissance dans l’armée. Selon une expression des soldats eux-mêmes, une nouvelle génération venait de « voir clair ». Elle n’hésitait pas à contester quand elle avait l’impression d’être en face d’une injustice. Le sergent-chef Ibrahima Coulibaly, dit IB, résume l’état d’esprit de ce nouveau soldat : « le soldat doit prendre le parti de la justice et de l’égalité ». Ils sont plus sensibles à la dégradation de leur condition de vie, au respect de leurs droits, aux inégalités sociales et politiques. Les futures générations de soldats leur emboiteront plus radicalement le pas.
C’est cette « nouvelle armée », « instruite » mais « contestatrice », que le colonel Robert Guéi « propulsé » à la tête de l’état-major devait discipliner dans une société aux repères fragilisés par la crise pour qu’elle ne se retourne pas contre la construction de la nation.
Cette tâche titanesque n’a pas abouti aux résultats escomptés. Les problèmes qui minent l’armée ivoirienne sont déjà présents dès cette époque bien qu’il faille faire une place à part à la crise de la conscription. De cette époque datent, en effet, les problèmes de recrutement dans l’armée ivoirienne, puisque la loi n° 61-210 du 12 juin 1961 portant recrutement des forces armées devenait caduque de fait. Ce n’est pas seulement cet aspect législatif qu’il faut retenir. Il y a aussi les pratiques qui naissent de la crise économique des années 80 qui a contraint l’Etat à une « professionnalisation » improvisée de l’armée. Les règles pour aller dans l’armée sont alors devenues floues. Plus tard, les jeunes y entreront par « la bande » ou prendront les armes. Des milliers de jeunes sont ainsi devenus des soldats, des rebelles en armes, des miliciens, des membres de groupes d’autodéfense, des manifestants armés, des vigiles armés. Ils sont devenus les acteurs principaux de la manipulation de la violence.
Le coup d’Etat de 1999 : naissance et cristallisation des factions militaires
Le coup d’Etat a été un véritable accélérateur de la déstructuration de l’armée, divisée par des choix partisans, ayant rompu avec la discipline et le respect de la hiérarchie après les mutineries des années 1990. Les dix mois d’une transition militaire chaotique qu’il a ouverte furent rythmés par des dissensions militaires et politiques que le vote d’une nouvelle Constitution n’a pu apaiser. Finalement, il accoucha d’élections violentes dont la contestation a débouché sur une rébellion.
A partir du coup d’Etat de 1999, on assiste à la multiplication des « milices » et autres gardes prétoriennes : Brigades rouges, Camora, Cosa Nostra, PC Crise. La Camora était chargée d’imposer l’ordre par la force. Ses membres contribuèrent à déstructurer le principe de la hiérarchie militaire par leurs manières de brutaliser les officiers. Les Kamajors basés à la maison de la télévision et à la radio avaient pour mission de sécuriser les lieux stratégiques de la ville. Ils devaient aussi tenir la poudrière d’Akouédo d’où était parti le coup d’Etat. Les Brigades Rouges avaient été créées au lendemain du coup d’Etat pour neutraliser les sources de contestation. Le groupe le plus connu du grand public était le PC-Crise qui était une sorte de tribunal militaire informel et un organe répressif. Ces factions vont jouer un rôle considérable tout le long de la transition puisqu’ils seront les bras armés dans l’affrontement des acteurs politico- militaires désormais convaincus que la transition ne pouvait se dénouer que dans la violence.
Une partie de l’armée au pouvoir éclata ainsi en clans opposés à côté du gros de la troupe qui resta silencieuse et d’une gendarmerie qui jouera un rôle important dans la répression des troubles de 2000. La tentative de coup d’Etat du 18 septembre 2000 dit du « cheval blanc » constitue le point de non retour de l’affrontement entre clans militaires. Les hommes du sergent chef IB sont arrêtés et accusés de vouloir accéder au pouvoir par les armes. Mais ces clans militaires qui s’affrontent dans les « bruits et la fureur » ne sont pas les seuls.
Pendant que les « nouvelles stars militaires » se battent violement, de nouveaux groupes de militaires, qui n’appartenaient pas au noyau des hommes du général Guéï, apparaissent et s’organisent selon des affinités politiques et ethniques qui remontaient bien avant le coup d’Etat.
Il suffit de regarder la liste des nominations opérées au mois de décembre 1999 en prenant en considération l’évolution militaire pour se rendre compte qu’en trois ans, les divisions de l’armée se sont renforcées pour donner naissance à des polarisations extrêmes. Certains des officiers du tableau d’avancement resteront dans le camp des loyalistes. C’est le cas de Glély Marcel, de Dogbo Blé Bruno, de Dagrou Loula, qui sera tué dès le début de la rébellion de 2002 dans le nord du pays, du lieutenant colonel Kassaraté commandant supérieur de la gendarmerie, du colonel Guai Bi Poin Georges qui dirigera l’Ecole de gendarmerie et le CECOS. Le colonel Bakayoko Soumaïla, qui dirigeait alors le Génie militaire à Bouaké, le colonel Gueu Michel, le colonel Bamba Sinima, se retrouveront dans le camp des Forces Armées des Forces Nouvelles (FAFN). Si l’armée s’est divisée sur une période aussi courte, il en va différemment de la gendarmerie dont la cohésion s’est maintenue.
Un diagnostic des difficultés que traverse l’armée ivoirienne doit aller en profondeur pour saisir l’essence de cette crise et non en rester à ses raisons apparentes. La sortie de la crise est conditionnée par la mémoire que les Ivoiriens doivent garder des problèmes militaires laissés sans solution et qui constituent encore aujourd’hui des obstacles. Le fait est que la reconstruction de la Côte d’Ivoire doit commencer par les militaires, les policiers, les gendarmes parce qu’ils sont des modèles ou qu’ils doivent l’être pour obliger la société à suivre grâce à la peur du gendarme et du glaive du juge. Reconstruire l’armée ivoirienne signifie en recomposer le format, les missions, l’opérationnalité. Mais une telle tâche de reconstruction sécuritaire ne peut pas être simplement technique. Elle est fondamentalement politique- quoi de plus politique que le mixage des forces ex-belligérantes- mais surtout éthique parce qu’en dessous des apparences techniques, il y a l’énorme décompression morale qui fait tituber la société tout entière. La nouvelle armée serait alors en rupture avec toutes les « mauvaises habitudes » qui ont conduit à la crise militaire.
Azoumana Ouattara
Universités des temps Libres, Libres penseurs, Defenseurs de la liberté, Ensemble, Sauvons notre monde!
mardi 4 octobre 2011
lundi 3 octobre 2011
LES REVELATIONS DE GUILLAUME SORO SUR LE 11 AVRIL 2011
Si c’est nous qui avions perdu, nos têtes seraient brandies devant le palais comme des trophées de guerre, nos bras à Yopougon, nos pieds à Koumassi. C’est clair ! Là où on nous aurait donné la mort, nous, on leur a donné la vie. Donc un peu d’humilité, faites de la repentance. Dites aux Ivoiriens, ce que vous avez fait contre eux. Le ministre Paul Koffi est là. On a fait les enquêtes et, aujourd’hui, tout le monde sait qu’on prenait les gens pour les découper comme le feraient des bouchers. On les mettait dans des sachets et on les jetait dans la lagune. C’est bien ce que nous avons vécu.
Mais nous, qu’est-ce que nous avons fait ? Dogbo Blé est là, à Korhogo. Il sait bien que nous lui avons sauvé la vie. Tous les chefs militaires ont été responsables. Qui a été tué par nous ? Dites-le moi !
Quand nous rentrions à Abidjan, nous nous sommes arrêtés à la lisière de la ville. J’ai appelé le général Dogbo Blé. J’ai dit ‘’mon général, nous avons encerclé la ville d’Abidjan. Je ne veux pas de bain de sang dans la ville d’Abidjan. Je vous demande en tant que patron de la garde républicaine, d’aller voir le président Gbagbo et de lui dire de déposer les armes. S’il n’a pas confiance en nous, qu’il aille à la résidence de l’ambassadeur de France ou à l’Onuci. Nous allons rentrer dans la ville d’Abidjan sans qu’il y ait combat. Je m’engage à négocier avec le président élu Alassane Ouattara pour qu’on négocie avec l’Union Africaine pour lui trouver un poste, comme on en a trouvé au général Sékouba Konaté en Guinée’’. Je me rappelle encore très clairement ce que le général Dogbo Blé m’a dit. Il m’a dit ‘‘monsieur le Premier ministre, je suis militaire et je sais me battre et j’ai les moyens de me battre’’. Voilà la réponse qu’il m’a donnée. J’ai dit merci mon général.
Moi, je ne suis pas militaire, je ne sais pas ce que cela veut dire, mais le civil que j’étais, j’ai compris qu’il n’était pas très disposé à faire la paix. Quand nous sommes entrés à Abidjan, le président m’a encore demandé d’appeler tous les généraux pour leur demander de venir faire allégeance. J’ai appelé tout le monde. Mangou est venu, Kassaraté est venu. Guiai Bi Poin est venu. Impossible de joindre Dogbo Blé. Et on apprend qu’il veut se déguiser pour sortir. Il a été pris. Lorsqu’il a été pris, Dieu seul sait et lui aussi le sait, il peut témoigner qu’on a dû donner de nos dos et de nos bras pour le protéger afin qu’il soit en vie. Et il est en vie. Il aura droit à un procès équitable.
Donc, je le dis publiquement pour que les gens le sachent. Vagba Faussignaux était dans le bunker, il s’est battu, il a été blessé. Mais c’est bien nous qui l’avons envoyé à la Pisam pour le soigner. Mais je sais très bien que si l’un d’entre nous était blessé, ce n’est pas à la Pisam qu’on l’aurait envoyé. Le premier acte de réconciliation, c’est de donner la vie et nous avons donné la vie à Dogbo Blé, à Faussignaux et à tous les officiers qui ne rêvaient de faire de nous qu’une bouchée. Quand on a fini cela, le reste, c’est une question de procédure.
C’est pourquoi, je voudrais m’adresser aux militaires parce que la fâcheuse tendance des politiques, c’est de manipuler l’armée. Il faut que l’armée reste et demeure apolitique au service de l’Etat parce que si on avait eu des généraux courageux, capables d’aller s’asseoir comme je l’ai fait le 30 novembre devant Gbagbo pour lui dire ‘‘Monsieur le président, nous sommes militaires, certainement que vous avez gagné mais la situation militaire sur le terrain est difficile’’. Peut-être qu’on n’aurait pas eu 3000 morts. De la même façon que le préfet de Bouaké s’est levé pour dire qu’il n’y a pas eu de fraude à Bouaké. (…)’’
L’armée n’est pas là pour se retourner contre sa population. L’armée est là pour la protéger contre tout danger, pour la sécuriser, pour sécuriser les biens de cette population.
Le jeu démocratique est simple, celui qui a gagné, c’est lui qui dirige. Tu as perdu, tu passes la main. Si tu veux revenir, le peuple est là, convainc-le, parle-lui, séduit-le, drague-le. Mais si on compte sur l’armée parce qu’on a nommé son cousin du village général, c’est terminé.
On est en 2011, ce qui a été possible en 1960 ne peut pas être possible en 2011. 2011, il y a facebook, twitter, rien ne peut se cacher. On est en 2011, la démocratie est partout. Qui aurait pu penser qu’en Tunisie, en Egypte, ces choses-là allaient se produire ?
Maintenant, la politique est moderne, c’est sur internet ; je me demande dans les années à venir, si les mêmes outils traditionnels d’appareils politiques vont survivre aux nouvelles technologiques de l’information et de la communication. Maintenant, les gens font leur campagne sur internet et ils gagnent.
Il faut que l’armée joue son rôle. Vous êtes-là, je sais que beaucoup sont allés en exil. Nous avons demandé à tout le monde de revenir. Mais nous ne pouvons pas obliger quelqu’un qui est allé en exil à revenir. Tous ceux qui sont revenus sont là, vivent tranquillement, il n’y a aucun problème. Moi-même, j’ai été un exilé et je sais ce qu’est que la vie d’exil. Au début quand tu vas, tu es tout courageux, tu es tout feu, tout flamme. Tous les matins, quand tu te réveilles, non seulement tu espères que le régime tombe mais dans tes rêves, tu vois que le régime est tombé. Tes rêves peuvent prendre dix ans, c'est-à-dire pendant dix ans, tu peux rêver. Arrêtez de rêver, venez en Côte d’Ivoire pour qu’on travaille pour construire le pays. Ce qui mérite d’être fait, c’est le travail, il faut qu’on travaille. Il faut rebâtir la Côte d’Ivoire. Il faut faire de la Côte d’Ivoire un Etat moderne, un Etat-leader qui tire les pays de la sous-région. C’est pourquoi, je voudrais insister auprès des chefs militaires pour qu’ils soient auprès de leurs hommes pour leur inculquer la discipline, leur inculquer l’amour du travail.
Les policiers reviennent ici, il faut que la population les accompagne. Mais il ne faudrait pas qu’on nous appelle après pour dire qu’il y a des rackets, ce n’est pas bon. Il faut que les populations accueillent les gendarmes mais, il faut bannir les aspérités du métier, les rackets et autres. Cela doit cesser. Concernant les douaniers, ce n’est pas la peine d’aller dédouaner jusque dans la chambre des gens. Je demande aux eaux et forêts de protéger nos forêts. Le gouvernement veut compter sur des hommes de valeur, compétents, rigoureux et disciplinés. Et cela, je suis convaincu que c’est possible de le réussir.
Je vous invite à accueillir ici à Bouaké le dernier pilier de notre nation, de l’Etat de Côte d’Ivoire. De votre accueil, dépendra le futur. Je veux qu’il y ait une symbiose avec la population de Bouaké.
Vive la ville pour que vive la Côte d’Ivoire. Je vous remercie ! »

Mais nous, qu’est-ce que nous avons fait ? Dogbo Blé est là, à Korhogo. Il sait bien que nous lui avons sauvé la vie. Tous les chefs militaires ont été responsables. Qui a été tué par nous ? Dites-le moi !
Quand nous rentrions à Abidjan, nous nous sommes arrêtés à la lisière de la ville. J’ai appelé le général Dogbo Blé. J’ai dit ‘’mon général, nous avons encerclé la ville d’Abidjan. Je ne veux pas de bain de sang dans la ville d’Abidjan. Je vous demande en tant que patron de la garde républicaine, d’aller voir le président Gbagbo et de lui dire de déposer les armes. S’il n’a pas confiance en nous, qu’il aille à la résidence de l’ambassadeur de France ou à l’Onuci. Nous allons rentrer dans la ville d’Abidjan sans qu’il y ait combat. Je m’engage à négocier avec le président élu Alassane Ouattara pour qu’on négocie avec l’Union Africaine pour lui trouver un poste, comme on en a trouvé au général Sékouba Konaté en Guinée’’. Je me rappelle encore très clairement ce que le général Dogbo Blé m’a dit. Il m’a dit ‘‘monsieur le Premier ministre, je suis militaire et je sais me battre et j’ai les moyens de me battre’’. Voilà la réponse qu’il m’a donnée. J’ai dit merci mon général.
Moi, je ne suis pas militaire, je ne sais pas ce que cela veut dire, mais le civil que j’étais, j’ai compris qu’il n’était pas très disposé à faire la paix. Quand nous sommes entrés à Abidjan, le président m’a encore demandé d’appeler tous les généraux pour leur demander de venir faire allégeance. J’ai appelé tout le monde. Mangou est venu, Kassaraté est venu. Guiai Bi Poin est venu. Impossible de joindre Dogbo Blé. Et on apprend qu’il veut se déguiser pour sortir. Il a été pris. Lorsqu’il a été pris, Dieu seul sait et lui aussi le sait, il peut témoigner qu’on a dû donner de nos dos et de nos bras pour le protéger afin qu’il soit en vie. Et il est en vie. Il aura droit à un procès équitable.
Donc, je le dis publiquement pour que les gens le sachent. Vagba Faussignaux était dans le bunker, il s’est battu, il a été blessé. Mais c’est bien nous qui l’avons envoyé à la Pisam pour le soigner. Mais je sais très bien que si l’un d’entre nous était blessé, ce n’est pas à la Pisam qu’on l’aurait envoyé. Le premier acte de réconciliation, c’est de donner la vie et nous avons donné la vie à Dogbo Blé, à Faussignaux et à tous les officiers qui ne rêvaient de faire de nous qu’une bouchée. Quand on a fini cela, le reste, c’est une question de procédure.
C’est pourquoi, je voudrais m’adresser aux militaires parce que la fâcheuse tendance des politiques, c’est de manipuler l’armée. Il faut que l’armée reste et demeure apolitique au service de l’Etat parce que si on avait eu des généraux courageux, capables d’aller s’asseoir comme je l’ai fait le 30 novembre devant Gbagbo pour lui dire ‘‘Monsieur le président, nous sommes militaires, certainement que vous avez gagné mais la situation militaire sur le terrain est difficile’’. Peut-être qu’on n’aurait pas eu 3000 morts. De la même façon que le préfet de Bouaké s’est levé pour dire qu’il n’y a pas eu de fraude à Bouaké. (…)’’
L’armée n’est pas là pour se retourner contre sa population. L’armée est là pour la protéger contre tout danger, pour la sécuriser, pour sécuriser les biens de cette population.
Le jeu démocratique est simple, celui qui a gagné, c’est lui qui dirige. Tu as perdu, tu passes la main. Si tu veux revenir, le peuple est là, convainc-le, parle-lui, séduit-le, drague-le. Mais si on compte sur l’armée parce qu’on a nommé son cousin du village général, c’est terminé.
On est en 2011, ce qui a été possible en 1960 ne peut pas être possible en 2011. 2011, il y a facebook, twitter, rien ne peut se cacher. On est en 2011, la démocratie est partout. Qui aurait pu penser qu’en Tunisie, en Egypte, ces choses-là allaient se produire ?
Maintenant, la politique est moderne, c’est sur internet ; je me demande dans les années à venir, si les mêmes outils traditionnels d’appareils politiques vont survivre aux nouvelles technologiques de l’information et de la communication. Maintenant, les gens font leur campagne sur internet et ils gagnent.
Il faut que l’armée joue son rôle. Vous êtes-là, je sais que beaucoup sont allés en exil. Nous avons demandé à tout le monde de revenir. Mais nous ne pouvons pas obliger quelqu’un qui est allé en exil à revenir. Tous ceux qui sont revenus sont là, vivent tranquillement, il n’y a aucun problème. Moi-même, j’ai été un exilé et je sais ce qu’est que la vie d’exil. Au début quand tu vas, tu es tout courageux, tu es tout feu, tout flamme. Tous les matins, quand tu te réveilles, non seulement tu espères que le régime tombe mais dans tes rêves, tu vois que le régime est tombé. Tes rêves peuvent prendre dix ans, c'est-à-dire pendant dix ans, tu peux rêver. Arrêtez de rêver, venez en Côte d’Ivoire pour qu’on travaille pour construire le pays. Ce qui mérite d’être fait, c’est le travail, il faut qu’on travaille. Il faut rebâtir la Côte d’Ivoire. Il faut faire de la Côte d’Ivoire un Etat moderne, un Etat-leader qui tire les pays de la sous-région. C’est pourquoi, je voudrais insister auprès des chefs militaires pour qu’ils soient auprès de leurs hommes pour leur inculquer la discipline, leur inculquer l’amour du travail.
Les policiers reviennent ici, il faut que la population les accompagne. Mais il ne faudrait pas qu’on nous appelle après pour dire qu’il y a des rackets, ce n’est pas bon. Il faut que les populations accueillent les gendarmes mais, il faut bannir les aspérités du métier, les rackets et autres. Cela doit cesser. Concernant les douaniers, ce n’est pas la peine d’aller dédouaner jusque dans la chambre des gens. Je demande aux eaux et forêts de protéger nos forêts. Le gouvernement veut compter sur des hommes de valeur, compétents, rigoureux et disciplinés. Et cela, je suis convaincu que c’est possible de le réussir.
Je vous invite à accueillir ici à Bouaké le dernier pilier de notre nation, de l’Etat de Côte d’Ivoire. De votre accueil, dépendra le futur. Je veux qu’il y ait une symbiose avec la population de Bouaké.
Vive la ville pour que vive la Côte d’Ivoire. Je vous remercie ! »
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